Lilas, 3 ans, vient d’avoir un petit frère, Marcus. Elle qui était si sage, si facile, est devenue ingérable. Elle crie tout le temps, refuse tout, se roule par terre à la moindre contrariété. Pourtant, Lilas adore Marcus. Elle lui fait des bisous, aide Maman en lui amenant une couche propre lors du change, défend Marcus dès que d’autres enfants l’approchent. Alors pourquoi Lilas a-t-elle changé de comportement ? Va-t-elle devenir une enfant tyrannique ?

Françoise Dolto racontait à peu près cette histoire (à quelques modifications près) :

Il était une fois l’histoire d’un couple très heureux, qui s’aimait très fort. Un jour, Monsieur, très excité, explique à Madame qu’il va prendre une nouvelle concubine. Il lui raconte la joie que tout deux vont avoir et le bonheur que Madame aura à faire du shopping et à papoter avec sa nouvelle amie. A l’arrivée de la nouvelle concubine, tout le monde s’extasie sur sa beauté, sa grâce, sa douceur. On lui offre des cadeaux. Monsieur couvre la nouvelle concubine de baisers et d’attention. Quand Madame réclame alors des câlins, elle aussi, Monsieur lui rappelle qu’elle en a déjà eu plein, qu’elle en aura plus tard et qu’il est actuellement occupé. Il est vrai, par ailleurs, que la nouvelle concubine est adorable et que Madame prend beaucoup de plaisir à faire du shopping avec elle et à bavarder. Mais, Madame, au fond de son coeur, en veut énormément à Monsieur. Elle ressent une grande colère pour celui qu’elle aime si fort et pour qui elle reste si fidèle.

Isabelle Filliozat, psychothérapeute et auteure de nombreux ouvrages sur l’éducation, propose cette comparaison. Le parent est comme un porte avion. A la naissance, le bébé-avion y est posé en toute sécurité. En grandissant, il s’autorise à s’envoler de plus en plus haut, de plus en plus loin. Mais, au début surtout, il a toujours un oeil vigilant sur son porte avion. Si celui-ci est occupé, il revient vite vérifier qu’il y a toujours de la place pour lui, qu’il peut y retourner en toute sécurité. C’est ce qui explique que pendant la sieste de Marcus, Lilas joue tranquillement dans son coin et que, dès que son frère se réveille, Lilas réclame sa part de câlin.

Lilas a peut-être très peur que ses parents ne l’aiment plus et leur en veut de leur infidélité. Elle peut également être en colère contre ce petit fauteur de trouble. Face à ce changement énorme, elle est déstabilisée, insécurisée. La jalousie est un processus naturel, plus ou moins présent chez les enfants. Vouloir la supprimer ou la nier par la force ne fait que la renforcer ou au contraire la refouler (pour mieux revenir sous forme de symptôme…).

Rassurez votre enfant en lui rappelant tout votre amour, toute l’importance qu’il/elle a pour vous (je t’aime parce que tu es une petite fille qui…). Gary Chapman décrit les 5 langages de l’amour. Adaptez-vous au langage privilégié de votre enfant (mots, moments de qualité, contact physique, service rendu, cadeau).

Haim Ginott le disait bien “tous les sentiments sont légitimes (tu as le droit d’être en colère contre ta soeur), mais les comportements ne sont pas tous acceptables (tu n’as pas le droit de la frapper)”. Accueillez les sentiments de vos enfants, canalisez les comportements (voir les articles sur Faber et Mazlish).

Et armez vous de patience. Rassurer un enfant au prise avec la jalousie est long et se construit dans le quotidien au fur et à mesure des expériences positives !

 

Ségolène Hartz, psychologue et présidente de L’Accolade